En 2021, le CNM avait révélé qu’entre 1 et 3 milliards des streams en France étaient considérés comme frauduleux, soit jusqu’à 3% du total des streams du marché cette année-là. En appliquant ce pourcentage aux revenus générés par le streaming en France en 2021, ces fraudes représenteraient 14,76 millions d’euros !
A l’international, la part des streams considérés comme frauduleux n’est pas connue. Cependant, si l’on appliquait les chiffres du CNM au marché international, 3% des revenus générés par le streaming sur le marché mondial représenteraient 507 millions de dollars !
Une part importante donc, mais qui représente pourtant uniquement les streams détectables par les services de streaming : la part des fraudes sur le nombre de streams serait ainsi en réalité bien plus élevée.
Comment l’industrie musicale réagit-elle face à cette manipulation des streams ?
Pourquoi manipuler son nombre de streams ?
La manipulation frauduleuse des streams correspond au fait de gonfler artificiellement son nombre de streams dans le but de générer des revenus ou de manipuler la popularité de sa sortie dans les différents classements, les playlists ou les résultats de recherche.
Pour ce faire, les artistes ont généralement recours à des services de promotion ou de playlisting utilisant des bots diffusant en continu le titre déterminé afin d’amplifier ses résultats et le placer parmi les sorties les plus populaires.
Dans notre dernier rapport, nous avons pu voir que les différentes raisons qui motivaient les artistes à avoir recours à la manipulation frauduleuse de leur nombre de streams suivaient un objectif commun d’asseoir leur positionnement en tant qu'artiste. On retrouvait ainsi plusieurs motifs :
- Maintenir son positionnement dans les charts et obtenir dès les premières semaines un nombre de streams conséquent
- Obtenir un meilleur référencement sur les plateformes de streaming, avec des placements en playlists et une meilleure prise en compte par les algorithmes de suggestion
- Générer plus de revenus
- Affirmer sa position et s'approprier les prises de paroles
Mais la manipulation frauduleuse des streams affecte l’industrie musicale en diluant le total des rémunérations, et donc en réduisant les revenus des streams légitimes. De plus, ces fraudes ralentissent largement les processus d’approbation et de diffusion des titres pour les artistes.
Les initiatives anti-fraude dans l’industrie musicale
Pour pouvoir lutter contre ces pratiques, l’industrie musicale s’est récemment rassemblée en une alliance : Music Fights Fraud.
Music Fights Fraud est un groupe international destiné à éradiquer la fraude des streams. Composé de membres de tous les secteurs de l’industrie musicale, le groupe forme une réelle alliance visant à détecter, prévenir, atténuer et appliquer des mesures anti-fraude, avec l’aide de la NCFTA (National Cyber-Forensics and Training Alliance), un réseau d'entreprises privées, de gouvernements et d'universités à but non lucratif et conçu pour offrir un environnement neutre permettant d'identifier et de réprimer la cybercriminalité.
Parmi les membres de l’alliance, on compte des géants de l’industrie comme Spotify, Believe, TuneCore, Amazon Music ou encore DistroKid.
Pourtant, ce n’est pas la première fois que l’industrie musicale tente de s’allier pour lutter contre les fraudes. En effet, en 2019, une initiative contre la manipulation des streams – “Anti-Stream Manipulation Code of Best Practice”, avait été lancée et signée par les 3 majors, Sony/ATV, Merlin, Spotify, Amazon, Deezer, ainsi que d’autres acteurs de l’industrie.
Ces différentes initiatives montrent que depuis longtemps, les acteurs de l’industrie musicale tentent de se battre contre la fraude aux streams. Pourtant, au fil des années, la manipulation frauduleuse des streams ne semble pas prête à prendre fin.
La mise en place de la Music Fights Fraud Alliance en association avec la NCFTA va-t-elle réellement changer la donne ? Affaire à suivre…